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Université populaire de Caen
Un
objet fut proposé par les enfants : un « chouchou » noir et
rouge, sorte de parure pour cheveux portée par les enfants et les jeunes
filles. Conformément aux décisions prises précédemment, ils purent proposer
soit des questions inspirées par cet objet, soit d’autres, librement
inventées.
QUESTION RETENUE APRES LE VOTE :
Cette séance fut curieuse, dans la mesure où les discussions informelles qui ont souvent lieu à la pause se poursuivirent au-delà de l’heure que nous avions fixée pour le début de la discussion. J’indiquai par exemple, grâce à un petit calcul que je venais de faire, que les filles représentaient environ soixante-cinq pour cent des présences à l’atelier depuis le début de l’année, ce qui me semblait une proportion importante. Quelle explication lui donner ?
D’autres échanges eurent lieu ensuite dont le thème central fut, en gros, « Quel pouvoir les adultes ont-ils sur les enfants ? » Mais comme c’était une discussion tout à fait informelle, j’y participai, et omis donc de prendre des notes… Ce qui suit est donc restitué de mémoire.
C’est une parole d’une des habituées du cours de Michel qui fut le point de départ. Peu de temps avant le début de la séance de ce mardi-là, elle me disait en parlant de l’atelier de discussion philosophique pour enfants que cette initiative était intéressante, mais que certaines des personnes auprès desquelles elle était intervenue pour qu’elles y amènent leurs enfants lui avaient rétorqué qu’ils s’en abstenaient car ils avaient peur, en le faisant, de perdre le contrôle, le pouvoir qu’ils avaient sur eux… Ce qui, au passage et sans que je l’aie sollicité le moins du monde, corroborait un certains nombre des thèses que je défends depuis plusieurs années qui pourraient pousser des enseignants à se méfier de ces activités, ou à ne les exercer que dans la mesure où ils restent d’une certaine façon aux commandes… J’en vins donc avec les enfants et les adolescents de l’atelier à me demander ce que ça voulait dire « avoir du contrôle », et à quelles fins les adultes souhaitaient en avoir sur leurs enfants, en particulier dans le déroulement de leurs études. Est-ce une question d’image, comme le suggérèrent certains des enfants, dans la mesure où des parents seraient fiers de voir leur progéniture occuper un rang social qu’eux-mêmes n’avaient pu atteindre (« Ils seront pharmaciens parce que Papa ne l’était pas », chantait Jacques Brel) ? Est-ce une question d’aisance financière, une bonne situation comme on dit, pouvant être le gage que les enfants aideront leurs parents vieillissants ? Nous nous sommes perdus en conjectures… Je marquai ma surprise de voir de tels comportements perdurer, après toutes ces possibilités d’ouverture grâce à l’augmentation générale du niveau d’étude, à la percée d’idées nouvelles dans la mouvance de Mai 68, qui ne date pourtant pas d’hier, à l’information disponible pour le plus grand nombre… Et m’étonnai aussi d’avoir été élevé, moi, selon des principes que je revendiquerais : très peu d’injonctions, la possibilité toujours ouverte de discuter, de faire le métier que je souhaitais, d’aller volontairement au catéchisme pendant trois ans, puis de le quitter quand le travail demandé faisait une concurrence indue à celui qui relevait de mes études au collège… Et considérant que tout ceci avait eu lieu entre 1960 et 1975, il y a maintenant plus de trente ans, je m’étonnai à nouveau que de tels principes éducatifs ne se soient pas davantage répandus depuis…
Les jeunes voulaient continuer cette discussion, mais j’avais vraiment l’impression de parler de moi, d’imposer mes vues, et de faire le contraire de ce que je prône… J’ai donc insisté pour revenir sur la question du jour, en reprenant le fonctionnement habituel. Je me suis donc remis au clavier de l’ordinateur, je me suis tu, et nous avons désigné une distributrice de parole…
Pour Virginie, un a priori, c’est quelque chose qu’on dit sur une personne, en pensant qu’elle est comme ça, alors qu’elle ne l’est pas… Plusieurs des discutants affirment avoir souvent des a priori, en regardant les personnes par exemple. Et certains disent que leur premier jugement se révèle exact. Bien sûr, ce jugement peut être positif ou négatif. Le prénom est souvent révélateur, nous dit Olivier, et le mode vestimentaire aussi, ajoute Hélène.
Pour Justine, les a priori, ce sont des préjugés. C’est peut-être vérifié, dans certains cas, mais ça ne lui plait pas qu’on en ait car on fait des généralités et que ça peut jouer des mauvais tours. D’autant que les gens qu’on juge ainsi peuvent avoir en retour des a priori sur nous. Olivier précise que, quand il a des a priori, il attend un peu pour considérer son jugement comme définitif, et qu’il ne s’est jamais trompé.
Plusieurs dans le groupe insistent alors pour dire qu’il faut se méfier des a priori, Justine estimant par exemple qu’on met en route un cercle vicieux. Pour elle, il faut aussi prendre les gens tels qu’ils sont, sans faire attention au prénom ou aux vêtements. C’est le critère de ce jugement qui pose problème à Hélène. Pour elle, on ne peut pas se baser sur le prénom, mais le mode vestimentaire montre des choses quand même : si on est calme, on ne met pas de choses fluo par exemple. Léa semble d’accord puisque elle dit que le mode vestimentaire fait référence au goût des personnes, alors que le prénom ce sont les parents qui le choisissent. Mais un contre-exemple est donné par Virginie, qui parle de cette jeune fille appelée Lolita et qui a le type de personnalité qui va avec ce prénom : elle est souvent en compagnie des garçons.
Hélène indique aussi qu’il arrive que des gens cachent des choses aussi, ou cache leur jeu, comme le dit Virginie.
Justine revient alors sur l’ensemble de la discussion et dit que, depuis le début, on semble présupposer que les a priori sont quelque chose de mauvais c’est mauvais. Mais, pour elle, c’est aussi une façon de se protéger ; il ne faut pas ouvrir cette barrière trop vite. Faisant une synthèse des deux précédente remarques, Hélène dit qu’il y a des gens qui nous poussent à faire des choses qu’on ne voudrait pas faire, ils nous trompent en ne se montrant pas tels qu’ils sont réellement
Se pose alors le degré de certitude accordé à un a priori. Il semble que l’apparence détermine un certain nombre de choses, au moins dans le premier contact. Quand on voit de nouvelles personnes, à la rentrée des classes, par exemple, on se pose des questions sur elles, mais on ne porte pas de jugement. On a quand même un peu une première idée : on pense savoir avec qui on va discuter, avec qui on va faire des bêtises. Mais il n’y a pas de certitudes.
Hélène reprend alors l’argument de émis plus tôt par Léa en disant qu’il ne faut pas avoir des a priori par rapport au prénom puisque c’est les parents qui le choisissent avant la naissance. Virginie semble affirmer le contraire : elle connaît une autre Virginie qui voudrait être styliste. Elle vient en classe avec une montre à la cheville, des bandeaux dans les cheveux… Olivier déclare ne pas comprendre où Virginie veut en venir avec cet exemple. Celle-ci répond que cette autre Virginie ne passe pas son temps à rire, comme elle, mais qu’elle passe tout son temps sur son aspect extérieur.
Justine déclare alors qu’elle essaie de ne pas avoir d’a priori. Pour elle, il faut lutter contre ça, même si tous les Kévin qu’on a rencontrés étaient comme ceci ou comme cela. D’autant, ajoute Hélène, qu’on détermine son mode vestimentaire d’après son caractère et non le contraire. Argument battu en brèche par Justine, puisque dans la cour on on voit tout le monde habillé de la même façon : ce n’est donc pas le caractère qui transparait.
Revenant sur l’exemple de l’autre Virginie, le groupe semble
être globalement d’accord pour dire que ce genre de comportement, l’adoption
d’un mode vestimentaire excentrique, est assez rare, et prouve que la personne
en question se moque de l’avis des autres ; c’est une façon de se faire sa propre personnalité, sa propre
façon d’être. Ceux qui osent avoir un look, en règle générale, ils osent sortir
du lot…
Ont distribué la
parole :
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